Quelles trajectoires de réhabilitation pour la décharge de l’Île d’Ouessant (29) ? Retour sur dix années de recherche-action
Cette article a été réalisé dans le cadre de la thématique 10ème Colloque du Réseau d’Échange et de Valorisation en Écologie de la Restauration - REVER 10. Paris, 19-21 mars 2019
Coordonné par Philippe GOURDAIN
Le réseau d’échange et de valorisation en écologie de la restauration (REVER) a été fondé en 2009. Visant à partager des retours d’expériences, ce colloque est aussi une opportunité pour créer du lien entre chercheurs, praticiens, gestionnaires d’espaces naturels, bureaux d’études et industriels.
La dixième édition de ce colloque a été co-organisée entre le réseau REVER, le Centre de Ressource Génie écologique puis l’UMS PatriNat et ses tutelles, le MNHN et l’OFB. Elle a été l’occasion de réfléchir sur les finalités de la restauration écologique, de partager différentes réalisations éclairantes et de tracer des perspectives d’actions concrètes en faveur de la biodiversité.
Pas moins de 23 présentations et deux tables rondes se sont tenues à cette occasion. Vingt posters ont aussi été présentés Les sujets traités concernaient la gestion et la restauration des milieux de landes, pelouses et prairies, la gestion des espèces exotiques envahissantes (EEE), la végétalisation et translocation d’espèces. D’autres sessions concernaient aussi la restauration des fonctionnalités des cours d'eau et zones humides, la formation à la restauration écologique et enfin les outils socio-économiques dans les projets de restauration.
À l’issu du colloque REVER 10, quatre visites de terrain ont été organisées dans le cadre de ce colloque en partenariat avec trois structures naturalistes d’Ile-de-France : 1. l’association ESPACES, qui a présenté des actions de restauration des berges de Seine dans le secteur de l'île Saint-Germain 2. l’association ATHENA78 qui a présenté des installations et suivis de batracoduc et batracodrome dans le secteur de la forêt de Rambouillet et 3. L’ANVL qui a animé deux sorties, la première sur la restauration des landes et pelouses dans le massif de Fontainebleau puis la restauration de carrières alluvionnaires dans la vallée de la Bassée (sud Seine-et-Marne).
Plus de 200 personnes ont assistées à cette édition 2019.
En 2009 était lancée l’étude préalable à la fermeture de la décharge de Penn ar Roc’h située en contexte de pelouse et de lande de hauts de falaises littorales. Des échanges entre le bureau d’étude en charge de l’étude environnementale et des universitaires de l’Université de Brest menant des travaux de recherche sur la restauration écologique permettent de lancer une réflexion pour une expérimentation d’ingénierie écologique (transferts de litière de lande et de fauche de pelouse). Lors des journées REVER 2 à Brest en 2010, une visite du site de la décharge est réalisée juste avant les travaux, permettant de bénéficier de l’expertise des chercheurs et praticiens présents. Un partenariat se noue avec le Muséum national d’Histoire naturelle et l’Université de Brest pour mettre en place un suivi écologique de cette opération. Celui-ci est par la suite repris par le Parc naturel régional d’Armorique, gestionnaire du site Natura 2000 – sur lequel se situe l’ancienne décharge – et le Centre d’étude du milieu d’Ouessant. La dynamique de la végétation montre de fortes variations dans l’espace et dans le temps. Si les résultats des premières années étaient encourageants, avec l’apparition d’espèces cibles de lande (ajonc et bruyère), un coup d’arrêt de la dynamique a été observé ces dernières années en lien probable avec des perturbations (tempêtes, pâturage par un troupeau de chèvres). La question d’une nouvelle intervention d’ingénierie écologique est donc posée sur ce site, même si la lenteur du processus écologique est plutôt un bon signe sur ce type de milieu naturellement contraint. Ces résultats, mis en perspective avec ceux d’autres opérations de restauration menées en Bretagne, confirment l’existence possible de dynamiques particulières de la végétation sur des sites de hauts de falaises perturbés par d’anciennes infrastructures : les trajectoires de successions sont alors plus aléatoires que sur des sites uniquement dégradés par la fréquentation.